Par Edgard MFOUBA*
Banquier, Entrepreneur et Expert en Modélisation Economique de Projets, fondateur du Cabinet GABAO Stratégie & Conseil
« Le Conseil des ministres du 30 juin 2025 a posé des actes forts. La création de plusieurs fonds stratégiques – pour l’eau, l’énergie, l’agriculture, la pêche, l’habitat ou les infrastructures – ainsi que des mesures d’interdiction à haute portée symbolique, comme l’arrêt progressif de l’exportation de manganèse brut ou de l’importation de poulet de chair, traduisent une volonté de reconquête économique et de souveraineté assumée. C’est une orientation que l’on ne peut que saluer.
Mais il serait illusoire de croire que des décrets suffisent à faire naître des résultats. L’expérience gabonaise est jalonnée d’initiatives aussi ambitieuses que fragiles, qui ont échoué faute d’anticipation, de cohérence ou de capacités d’exécution.
Car le plus difficile commence après le Conseil des ministres. Il faudra transformer des intentions politiques en projets concrets, déployés sur le terrain, portés par des institutions solides, des hommes compétents et des budgets effectifs. Il faudra surmonter les lenteurs administratives, les résistances sectorielles, les contraintes financières, le manque de données fiables, et parfois même une forme de cynisme résigné face aux réformes.
Prenons l’exemple de la centrale d’achats annoncée : sur le papier, elle apparaît comme un outil puissant pour stabiliser les prix et sécuriser l’approvisionnement du pays. Mais sans maîtrise logistique, sans gouvernance transparente, sans mécanismes de contrôle clairs, elle peut rapidement se transformer en machine à pertes, ou en zone d’opacité.
Même prudence face à l’annonce d’interdictions économiques à échéance : la transformation locale du manganèse, tout comme la relance de la filière avicole, nécessitent bien plus que des délais réglementaires. Elles supposent des investissements massifs, une montée en compétence des acteurs nationaux, des incitations efficaces, une gestion rigoureuse des transitions.
C’est donc la méthode de mise en œuvre qui déterminera le succès. Cela implique :
– Une planification rigoureuse par étapes ;
– Un dialogue constant avec les acteurs concernés ;
– Une ingénierie de projets bien structurée ;
– Et une capacité à évaluer, corriger, et relancer en continu.
Le Gabon a souvent souffert de décisions bien intentionnées, mais mal exécutées. Réussir aujourd’hui exige d’agir autrement. En combinant volontarisme politique, excellence technique, et implication citoyenne.
Les décrets peuvent ouvrir des chemins. Mais c’est l’effort collectif, constant, souvent invisible, qui trace durablement la voie du succès ».
Similaire
Crédito: Link de origem