Chaque 1er Mai, c’est le grand show sous le regard paternel du Président de la République, du gotha politique et des grands patrons : des cortèges bariolés, des casquettes publicitaires, des t-shirts flanqués de logos, des selfies militants, le tout sous l’œil attendri des caméras des chaines de télévisions publiques et privées.
Une belle journée de parade où salariés et patrons semblent main dans la main, comme dans une comédie romantique mal jouée. Et pourtant… rappelons le, le 1er Mai n’est pas censé être un carnaval d’entreprise. C’est la Journée internationale des droits des travailleurs, issue des luttes ouvrières, pour la dignité, le respect et le travail décent.
Mais aujourd’hui, à force de drapeaux brandis sous les applaudissements de leurs propres employeurs, les travailleurs semblent avoir oublié l’essentiel. Derrière les paillettes et les canettes de bières au-delà la parade, il y a les accidentés du travail, abandonnés sans prise en charge, des entreprises qui contournent ou ignorent leurs obligations sociales, refusent de verser les cotisations sociales à la CNSS et CNAGS, escamotent la sécurité, et des retraités transformés en mendiants modernes, infantilisés pour accéder à la maigre pension qu’ils ont pourtant amplement méritée.
Il y a aussi les ayants droit de travailleurs décédés — veuves, veufs, orphelins — condamnés à errer dans les couloirs administratifs pour réclamer les fruits du travail de leurs proches disparus. Et que dire des maladies professionnelles, ignorées, non reconnues, des expositions dangereuses au travail, des normes de sécurité piétinées ?
Et pendant ce temps, les jeunes sont exploités sous couvert de stages éternels, mal ou pas rémunérés, des CDI déguisés qui ne disent pas leur nom. Leur expérience, bien sûr, ne compte pour rien au moment d’entrer sur le marché de l’emploi, où même les diplômés et cadres doivent accepter des jobs humiliants, au nom d’une soi-disant « abondance de la demande ».
Cerise sur le gâteau : on nous explique que le chômage vient surtout de l’inadéquation formation-emploi, comme si la reconversion professionnelle n’existait pas, comme si les emplois ne s’évaporaient pas au profit des partisans, militants et sympathisants bien placés. Et que dire de ces concours et tests de recrutement dont les résultats sont connus d’avance, mais qui nourrissent l’illusion des plus démunis qu’un avenir meilleur est encore possible ou du non-respect de la loi sur les emploi nationaux, attribution des permis de travail douteux aux expatriés ?
Pendant ce temps, les délégués du personnel et les syndicalistes s’affichent bras dessus, bras dessous avec les politiques, troquant le combat pour un strapontin. Le 1er mai, jadis symbole de lutte, est devenu une mascarade où l’on distribue gadgets et slogans, pendant que les vrais problèmes, eux, restent bien à l’écart, soigneusement refoulés.
Chers travailleurs, amusez-vous bien sous les banderoles colorées. Le lendemain, n’oubliez pas de remettre votre badge, votre sourire professionnel et votre contrat précaire avant de retourner à vos illusions perdues.
Juldas Stevince BIWAGOU, Manager, Communicant et homme de Médias
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