Niamey : La marche de la COSNAS interdite, une onde de choc dans la quête de souveraineté sahélienne
Dans la chaleur vibrante de Niamey, où les espoirs de souveraineté se mêlent aux tensions géopolitiques, une décision municipale est venue tempérer cet élan citoyen. Le 23 avril dernier, l’Administrateur délégué de la ville de Niamey a signé un arrêté interdisant, pour des raisons sécuritaires, la marche et le meeting prévus ce 30 avril par la Convergence pour la Souveraineté des Nations du Sahel (COSNAS). Ce rassemblement, porté par une ferveur patriotique, ambitionnait de dénoncer l’attitude de l’Algérie dans sa crise avec le Mali tout en réaffirmant un soutien indéfectible à la Confédération de l’Alliance des États du Sahel (AES) et à ses forces armées. Mais au-delà de l’aspect sécuritaire invoqué derrière cette interdiction, c’est tout un faisceau de dynamiques régionales et de luttes pour l’autonomie qui se dessine, dans un Sahel en pleine redéfinition de son destin.
COSNAS : la voix de la rupture et le soutien à l’AES au cœur du rassemblement manqué
Précisément, cette marche avait pour vocation d’être la voix du peuple. La COSNAS, née dans le sillage des bouleversements politiques au Niger, incarne l’aspiration d’une jeunesse et d’une société civile déterminées à rompre avec les chaînes du néocolonialisme. Ce mouvement, fort de son ancrage populaire, avait appelé à une mobilisation massive dans les artères de la capitale nigérienne, dans le but de fustiger ce que les organisateurs perçoivent comme une posture déstabilisatrice de l’Algérie, notamment après l’incident du 31 mars 2025, où un drone malien aurait été abattu par l’armée algérienne, accusé d’avoir violé l’espace aérien. Bamako, niant l’intrusion, avait dénoncé une agression, entraînant ainsi une escalade diplomatique marquée par le rappel des ambassadeurs du Mali, du Niger et du Burkina Faso à Alger.
Cependant, au-delà de cette crise spécifique, la marche se voulait un vibrant plaidoyer pour la Confédération AES, cette alliance forgée en juillet 2024 par le Niger, le Mali et le Burkina Faso, tous trois dirigés par des militaires. L’AES, avec ses promesses d’intégration économique et de défense autonome, symbolise pour beaucoup un rempart contre l’influence étrangère face aux défis sécuritaires, notamment la lutte contre les groupes djihadistes qui ensanglantent la région. La COSNAS, en convoquant les citoyens à Niamey, entendait galvaniser cet élan, transformant ainsi la capitale en un théâtre d’expression collective.
L’interdiction qui interroge : sécurité ou contrôle de la ferveur patriotique ?
Toutefois, l’arrêté municipal, invoquant des impératifs de sécurité, a douché cet élan. Si les autorités n’ont pas détaillé les menaces spécifiques, le contexte régional, marqué par une insécurité chronique et des tensions diplomatiques, pourrait justifier une telle prudence. Le Sahel, épicentre de violences djihadistes et de rivalités géopolitiques, est une poudrière dans laquelle tout rassemblement peut devenir un point de fracture. Néanmoins, cette interdiction soulève des interrogations. Est-elle une mesure de précaution sincère ou une tentative de contenir une ferveur populaire qui pourrait bousculer l’ordre établi ? Dans un Niger où le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) s’appuie sur un soutien populaire pour légitimer son pouvoir, brider une initiative comme celle de la COSNAS pourrait sembler paradoxal.
De surcroît, cette décision intervient à un moment charnière pour l’AES, qui intensifie sa coopération militaire et économique. La COSNAS, en soutenant publiquement cette dynamique, se positionne comme un relais de la volonté de l’AES, mais aussi comme un aiguillon, rappelant que la souveraineté ne peut s’épanouir sans la voix du peuple.
Un Sahel sous tension, mais la soif de souveraineté demeure intacte
Plus globalement, l’interdiction de la marche de Niamey résonne comme un écho des dilemmes qui traversent le Sahel. D’un côté, l’AES, en rejetant l’influence de l’ECOWAS et de la France, trace une voie audacieuse vers l’autonomie. Les partenariats avec la Russie, la Turquie ou la Chine, bien que controversés, témoignent de cette quête de diversification. De l’autre, les tensions avec des voisins comme l’Algérie, jadis médiatrice dans les crises maliennes, rappellent la fragilité de l’unité régionale. L’incident du drone malien, loin d’être anecdotique, a exacerbé les méfiances, l’AES y voyant une atteinte à sa souveraineté collective.
Malgré l’interdiction, la COSNAS reste un symbole de la résilience populaire. À Niamey, les voix de la rue laissent entendre que l’élan ne s’éteindra pas si facilement. Les organisateurs, bien que contraints, pourraient réinventer leurs modes d’action, usant par exemple des réseaux sociaux ou de rassemblements plus discrets pour porter leur message. Car au fond, ce qui anime la COSNAS, c’est une soif de dignité, un refus de voir le Sahel réduit à un échiquier des puissances étrangères.
Niamey, épisode révélateur d’un destin régional en mouvement
Au final, l’interdiction de la marche de ce 30 avril à Niamey s’impose comme un épisode administratif révélateur, cristallisant les tensions, les ambitions et les espoirs d’un Sahel en pleine mutation. Alors que l’AES s’emploie activement à bâtir un rempart contre l’insécurité et l’ingérence, des mouvements comme la COSNAS affirment que l’adhésion des peuples constitue la pierre angulaire d’une souveraineté pleinement réalisée. Dans les ruelles poussiéreuses de Niamey, entre les drapeaux de l’AES et les chants des jeunes militants, s’écrit l’histoire d’une région qui se dresse résolument face aux obstacles. L’avenir révélera si cette flamme éclairera durablement le chemin d’une unité véritable ou saura s’adapter aux défis.
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