Mali : une suspension inédite des partis politiques ébranle la scène démocratique
Bamako, 7 mai 2025 – Dans une décision aussi soudaine que retentissante, le gouvernement malien a décrété, ce mercredi à 12 h 00, la suspension temporaire de toutes les activités des partis politiques et des associations à caractère politique. Invoquant des « raisons d’ordre public », cette mesure, effective jusqu’à nouvel ordre, plonge le pays dans une zone d’incertitude démocratique. En effet, cette résolution, qui fait suite à une conférence nationale controversée tenue le 29 avril à Bamako, soulève des interrogations sur l’avenir du pluralisme dans un Mali déjà marqué par une transition militaire prolongée.
Derrière la décision choc : ordre public ou volonté de consolidation du pouvoir ?
Le décret, lu sur les ondes de l’ORTM à 13 h 00, intervient dans un contexte de tensions croissantes. Plus précisément, le 29 avril dernier, le Centre International de Conférences de Bamako (CICB) a accueilli une rencontre entre des militants de la société civile et des représentants proches du pouvoir. Selon des sources locales, les participants, réunis sous l’égide du gouvernement, ont recommandé la dissolution de tous les partis politiques, l’interdiction du nomadisme politique et la suppression du statut de chef de file de l’opposition.
Ces propositions, perçues comme une tentative de consolidation du pouvoir par le président Goïta, ont suscité une levée de boucliers parmi les acteurs politiques. De son côté, le gouvernement malien justifie cette suspension par la nécessité de préserver la stabilité dans un pays confronté à une insécurité persistante. Toutefois, depuis les coups d’État de 2020 et 2021, le Mali navigue sous une transition militaire dirigée par Assimi Goïta, qui a promis un retour à l’ordre constitutionnel, initialement prévu pour mars 2024. Or, des reports successifs, attribués à des « raisons techniques », ont exacerbé les frustrations.
« Atteinte grave aux libertés » : l’opposition malienne se mobilise et dénonce la suspension des partis politiques
La suspension, qui interdit toute activité politique, a déclenché une onde de choc. Non seulement cette mesure interdit toute activité politique, mais elle frappe également la couverture médiatique des partis. Plus tôt, le 3 mai, à 10 h 00, des opposants ont tenté d’organiser une réunion au Palais de la Culture à Bamako pour dénoncer les recommandations du 29 avril. Bloqués par les forces de l’ordre, ils ont malgré tout tenu leur assemblée à l’extérieur, rejoints par des centaines de manifestants scandant des appels à un retour rapide à la démocratie.
À l’issue de cette mobilisation, plus de 80 partis et deux organisations de la société civile ont exigé, dans une déclaration commune, la tenue d’élections présidentielles avant le 31 décembre 2025 et la libération des prisonniers politiques. « Cette mesure est une atteinte grave aux libertés fondamentales », a fustigé un porte-parole de la Plateforme du 31 mars, une coalition d’opposition, dans un communiqué publié à 16 h 00 le 6 mai. De même, des voix dissidentes, comme celle de l’opposant Housseini Guindo, appellent à une « résistance citoyenne » face à ce qu’ils qualifient de « dérive autoritaire ».
Isolement et inquiétudes : contexte régional, pressions internationales et défis sécuritaires
Cette décision s’inscrit dans un Mali en pleine recomposition géopolitique. D’abord, membre de l’Alliance des États du Sahel (AES) avec le Burkina Faso et le Niger, le pays a rompu ses liens militaires avec la France et s’est rapproché de la Russie, de la Chine, etc. Ensuite, la sortie de la CEDEAO, effective en janvier 2025, a réduit les pressions régionales pour un retour à l’ordre constitutionnel. Sur la scène internationale, l’ONU et Amnesty International ont exprimé leur « profonde préoccupation », dénonçant une restriction des droits à la liberté d’expression et d’association. À l’intérieur, le Mali reste sous la menace de groupes jihadistes, comme le JNIM, qui a revendiqué une attaque à Bamako en septembre 2024, tuant 77 personnes. Souvent, ces défis sécuritaires, couplés à des crises économiques, servent d’argument au gouvernement pour justifier un contrôle accru.
Avenir incertain : transition prolongée, la résistance s’organise à Bamako
Le Mali semble s’éloigner du pluralisme. En effet, la suspension, qui pourrait durer des semaines, voire des mois, laisse planer le spectre d’une transition prolongée sous l’égide du président Goïta, recommandé par la conférence d’avril pour un mandat de cinq ans renouvelable. Par ailleurs, à Bamako, la société civile prépare une réponse concertée.
Toutefois, malgré les risques de répression, une nouvelle mobilisation est prévue le 10 mai à 9 h 00. Ainsi, dans ce climat d’incertitude, le Mali se trouve à un carrefour : entre l’aspiration à la stabilité et la quête d’une démocratie véritable, le chemin reste semé d’embûches. En conclusion, cet épisode, loin d’être anodin, pourrait redessiner durablement le visage politique de la nation.
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