Dans un long entretien télévisé diffusé ce 31 mai, le général Abdourahamane Tiani, chef de l’État nigérien, a accusé la France, le précédent régime américain et plusieurs pays d’Afrique de l’Ouest de comploter avec des groupes armés pour déstabiliser le Sahel. Il affirme que Paris aurait planifié des enlèvements d’Occidentaux et que des réunions secrètes à Abuja ont permis d’organiser le soutien financier et logistique à ces groupes, via certains relais humanitaires.
Dans cette intervention de plus de trois heures de temps, le chef de l’État nigérien a dénoncé « une guerre néocolonialiste » menée selon lui par des puissances occidentales avec l’appui de groupes armés qu’il qualifie d’ « auxiliaires néocoloniaux ».
« Nous vivons une situation de guerre néocolonialiste menée par les puissances impérialistes avec des auxiliaires néocolonialistes que nous n’appelons plus jihadistes, pour des intérêts géopolitiques et géostratégiques des puissances occidentales néocolonialistes », a déclaré le général Tiani.
Enlèvements d’Occidentaux commandités
Il a notamment accusé la France d’avoir « planifié les enlèvements d’Occidentaux » dans la région. Selon ses propos, un homme nommé « Boubacrar Dabounguel » utilisé par la France aurait recruté « trois bandits : Momo, Ibrahim et Oumar » pour enlever « un Espagnol vers Tamanrasset (sud de l’Algérie), une Autrichienne et une Suissesse à Agadez (nord du Niger) ». Le chef de l’État affirme détenir des « éléments » prouvant cette implication, sans toutefois en produire au cours de l’entretien.
Une guerre médiatique contre l’AES
Au cours de son intervention, le général Tiani a également évoqué une « guerre communicationnelle » qu’il attribue aux anciennes puissances coloniales et à certains partenaires occidentaux. Selon lui, la France mènerait des campagnes d’influence numérique et médiatique en recrutant, par l’intermédiaire de ses agences de coopération médiatique, des web-activistes et journalistes dans les pays de l’AES. L’objectif, selon le chef de l’État nigérien, serait de déstabiliser les régimes militaires au pouvoir, manipuler l’opinion publique et affaiblir la Confédération des États du Sahel sur tous les plans.
Réunions avec des groupes armés et des puissances étrangères
Le président nigérien a également affirmé que des réunions secrètes se seraient tenues à Abuja, au Nigéria, les 25 janvier et 3 février 2025, réunissant des représentants de la France, des États-Unis, du Nigéria, du Bénin, de la Côte d’Ivoire, ainsi que des délégués de groupes armés terroristes tels que Boko Haram et ISWAP (État Islamique en Afrique de l’Ouest).
Selon lui, ces rencontres avaient pour objectif de renforcer le financement, l’armement et le soutien logistique de ces groupes pour mener des actions subversives contre les pays de la Confédération des États du Sahel (AES), à savoir le Niger, le Mali et le Burkina Faso.
Le général Tiani a accusé des relais humanitaires d’avoir été désignés comme circuits financiers pour ces opérations. « Pour tout soutien inférieur à un milliard de FCFA, c’est à travers le compte de la Croix-Rouge nigérienne. Pour les montants supérieurs, via les Croix-Rouge du Bénin, de Côte d’Ivoire et du Nigéria », a-t-il déclaré.
Expulsion du CICR
Dans ce contexte, Abdourahmane Tiani a expliqué la récente expulsion du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) du territoire nigérien, accusant certains de ses représentants d’avoir pris part aux réunions précitées.
C’est face à cette situation que le Niger a décidé d’expulser de son territoire le CICR, a-t-il expliqué, dénonçant le rôle présumé de cette organisation humanitaire dans ces manœuvres.
Force unifiée de l’AES face à la CEDEAO
Le général Tiani a par ailleurs salué les performances de la Force unifiée de la Confédération AES, regroupant le Niger, le Mali et le Burkina Faso, la présentant comme « une réalité qui a démontré ses preuves sur le terrain », contrairement à la « Force en attente » de la CEDEAO, qualifiée d’ « inefficace ».
Il a exhorté les populations du Sahel et au-delà, selon ses mots, à « être fières des efforts en cours contre l’impérialisme occidental malgré l’intensification des actions de déstabilisation et le tapage médiatique qui promet l’apocalypse ».
Ces accusations interviennent dans un climat tendu entre les pays de l’AES et plusieurs chancelleries occidentales, notamment Paris, depuis les coups d’État militaires au Mali (2021), au Burkina Faso (2022) et au Niger (2023). Ces trois pays se sont retirés de la CEDEAO en janvier 2024 et ont renforcé leur coopération sécuritaire et économique au sein de la Confédération AES.
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