
Plusieurs dizaines de militaires et de civils ont été tués dimanche par des jihadistes qui ont attaqué Djibo, importante ville du nord du Burkina Faso encerclée par les groupes armés depuis trois ans, selon des sources concordantes.
Depuis 2015, le Burkina Faso est confronté à de nombreuses attaques de groupes armés jihadistes liés à Al-Qaïda et l’État islamique sur la majeure partie de son territoire.
La ville de Djibo, proche de la zone dite des trois frontières entre Niger, Burkina et Mali où sévissent les groupes jihadistes, est assiégée par ces derniers depuis 2022.
Dimanche, des centaines de jihadistes ont attaqué simultanément le détachement militaire, les postes de police, de gendarmerie et ont fait des incursions dans des quartiers de la ville, faisant « plusieurs dizaines » de morts militaires et civils, ont dit à l’AFP des sources sécuritaires et locales.
« Ils sont venus par centaines, à bord de motocyclettes et de véhicules, encerclant pratiquement la ville », a précisé une première source sécuritaire.
– Incursions militaires –
« Des groupes ont fait des incursions dans certains quartiers de la ville, faisant des victimes parmi les populations civiles », a ajouté une deuxième source sécuritaire expliquant que « des éléments (de l’armée) sont tombés (morts), d’autres blessés, après avoir infligé des pertes aussi à l’ennemi ».
L’attaque de dimanche a été revendiquée le même jour par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans (GSIM ou JNIM en arabe), affilié à Al-Qaïda.
Des habitants joints au téléphone par l’AFP ont confirmé les attaques et évoqué un bilan de « plusieurs dizaines » de morts.
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Au secteur 4, un quartier de la ville, « des gens ont été exécutés devant leurs domiciles. Il s’agit particulièrement d’hommes. Les femmes et les enfants ont été épargnés », a dit à l’AFP un habitant de Djibo sous le couvert de l’anonymat.
« Les tirs ont duré plusieurs heures. Jusque dans l’après midi on entendait toujours des tirs nourris », a-t-il poursuivi.
Selon Wamaps, groupe de groupe de journalistes ouest-africains spécialisé dans l’actualité sécuritaire au Sahel, qui confirme un bilan « très lourd », les jihadistes sont « restés en ville de 6h à 13h », et ont fui avant l’arrivée de forces spéciales burkinabè.
– « Retour des terroristes » –
« Depuis hier soir, le calme est revenu, mais c’est une ville en deuil. On ne comprend pas comment une attaque de cette ampleur a pu être menée pendant plusieurs heures », a dit à l’AFP un second habitant de Djibo.
« Fuir ? Non, ce n’est pas possible de sortir de Djibo sans escorte. On est condamnés à rester », a-t-il ajouté, craignant un « retour des terroristes » dans la ville.
L’armée burkinabè organise de façon irrégulière des convois sécurisés pour le ravitaillement de la ville.
En septembre 2024, de nombreux habitants de Djibo avaient fui la ville après un ultimatum des jihadistes et en novembre 2023, 40 civils avaient tués dans une attaque contre la ville.
Dimanche, plusieurs autres localités du centre et du nord du pays ont également été attaquées, selon des sources sécuritaires qui n’ont pas communiqué de bilans. Certaines de ces attaques ont également été revendiquées par le JNIM.
Le Burkina Faso est dirigé par une junte militaire autoritaire et souverainiste, avec à sa tête le capitaine Ibrahim Traoré, au pouvoir depuis un putsch en septembre 2022.
– La junte face aux attaques –
Depuis son arrivée au pouvoir, la junte ne communique quasiment plus sur les attaques et assure régulièrement reconquérir des parties du territoire.
Mais le pays reste pris dans une spirale de violences qui ont fait depuis 2015 plus de 26.000 morts, civils et militaires, dont plus de la moitié ces trois dernières années, selon l’ONG Acled qui recense les victimes de conflits.
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Parallèlement, l’armée et ses supplétifs civils sont régulièrement accusés d’exactions: lundi, l’ONG Human Rights Watch a affirmé que les forces de sécurité avaient « dirigé et participé » au massacre de plus de 130 civils peuls, en mars, à Solenzo (ouest).
La junte a tourné le dos à la France, ancienne puissance coloniale et partenaire historique, pour se rapprocher notamment de Moscou.
L’attaque de Djibo est intervenue alors que le capitaine Ibrahim Traoré rentrait de Moscou, où il a assisté vendredi à une grande parade militaire sur la place Rouge aux côtés de Vladimir Poutine, à l’occasion des 80 ans de la victoire sur l’Allemagne nazie.
Lors de son séjour, le chef de la junte a réaffirmé au président Poutine son souhait de renforcer les liens militaires et scientifiques du Burkina avec la Russie.
Source : Agence France-Presse

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