
Le rappeur Werenoi, numéro un des ventes d’albums en France en 2023 et 2024, est mort à l’âge de 31 ans, a annoncé samedi son producteur sur le réseau social X.
« Repose en paix mon frère« , a écrit ce producteur, sous le pseudonyme de Babs, confirmant des informations de presse signalant le décès du rappeur à l’hôpital après une détérioration soudaine de sa santé.
– Un enfant de Montreuil à la voix du bitume –
Werenoi, Jérémy Bana Owona à l’état civil est né le 30 janvier 1994 à Melun (Seine-et-Marne) et a grandi à Montreuil, en banlieue parisienne. Werenoi a connu une carrière de météore, en s’imposant comme l’artiste ayant vendu le plus d’albums en France en 2023 comme en 2024, selon les chiffres du Syndicat national de l’édition phonographique (Snep).
D’origine camerounaise, il incarne cette jeunesse issue de l’immigration qui a fait du rap un moyen d’expression et de survie. Montreuil, réputée pour sa diversité culturelle et son ambiance bouillonnante, a été pour lui à la fois un refuge et une école de la rue.
Si, malgré ce succès immense, il est assez méconnu en dehors des amateurs de rap, c’est qu’il a cultivé une très grande discrétion médiatique.
Discret sur sa vie privée, il s’est toujours exprimé à travers sa musique, sans détour ni filtre, avec la voix rauque et le regard dur de ceux qui ont connu la galère. Loin des paillettes, il a donné une voix aux sans-visages, avec dignité, gravité et sincérité.
« Je préfère garder ma vie privée pour moi. A trop parler, tu peux dire ce que tu n’as pas envie de dire. Je préfère le mystère. J’en dis assez sur moi dans mes textes », lâchait-il.
Werenoi a revendiqué un goût pour la modestie, la réserve et le travail, qui lui aurait été inculqué par sa famille camerounaise de Montreuil (Seine-Saint-Denis).
– L’éclosion d’un talent brut et rare –
C’est au début des années 2020 que Werenoi se fait remarquer, d’abord sur YouTube et les réseaux sociaux, avec des freestyles coup-de-poing. Son nom circule vite, porté par un style hybride, entre rap de rue cru et mélodies autotunées maîtrisées, dans la lignée de SCH, Koba LaD ou encore Ninho, mais avec une identité sonore unique.
En 2022, ses morceaux “La Ligue”, “Guadalajara”, puis “Chemin d’or” explosent en streaming. Il impose son ton sombre, sa sensibilité masquée derrière des lunettes noires, et cette rage douce, ce mélange de colère et de fatalisme qui rappelle la dureté de la rue autant que le besoin d’en sortir.
– L’ascension : “Carré”, “Pyramide”, “Diamant Noir” –
Son premier album “Carré”, sorti en 2023, marque un tournant. Loin du simple tape de rue, il propose un projet dense, personnel, abouti. Il y livre des confidences voilées, parle de loyauté, de perte, de rêve de grandeur, tout en gardant ce ton énigmatique qui fait son mystère. Son public grandit, fidèle à cet artiste qu’on ne voit presque jamais, mais qu’on entend toujours avec intensité.
En 2024, il sort “Pyramide”, et en avril 2025, “Diamant Noir”, un projet considéré par beaucoup comme son sommet artistique. Il y multiplie les collaborations puissantes : Damso, Aya Nakamura, SCH, Maes, Zola, Ninho… mais toujours sans se perdre. Il restait Werenoi, celui qui ne faisait pas de promo, mais qui remplissait les salles.
– Un style, une voix, une empreinte –
Ce qui faisait de Werenoi un artiste à part, c’était sa voix reconnaissable dès la première note, son ton grave, ses punchlines mélancoliques, sa manière de parler de la rue avec autant de fierté que de douleur. Il chantait la trahison, l’argent, la loyauté, la solitude, mais aussi l’amour, toujours de loin, comme un mirage.
Sa musique touchait parce qu’elle semblait sincère, sans artifice, sans tentative de séduction commerciale. Il ne courait pas les médias, il ne faisait pas de vagues, mais il était écouté, respecté, et plus que tout, cru.
– Un départ brutal, une onde de choc –
Le 17 mai 2025, la nouvelle tombe : Werenoi est décédé à l’âge de 31 ans, à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière à Paris, des suites d’un arrêt cardio-respiratoire causé par une hyperkaliémie non régulée. La scène rap, les médias, les fans et ses proches sont sous le choc. Sa disparition, soudaine et inattendue, laisse un vide immense.
L’émotion est d’autant plus forte que Werenoi était en pleine ascension. Il préparait une tournée, de nouveaux clips, des projets musicaux avec l’international. Tout s’arrête, brutalement, comme une chanson coupée en plein couplet.
– L’héritage d’un diamant brut –
Werenoi, c’était plus qu’un rappeur : c’était un témoin du bitume, un artiste pudique, un frère silencieux pour beaucoup. Son parcours rappelle qu’on peut transformer la douleur en art, que l’ombre peut aussi briller, et que certaines voix, même éteintes, résonnent plus fort que jamais.
Son œuvre, ses albums, ses freestyles resteront. Ils seront écoutés encore et encore, comme un cri venu de Montreuil, comme un chant de la rue devenu hymne.
Etre l’artiste qui vend le mieux, expliquait-il au Parisien en janvier 2024, « c’est quand même une surprise, mais cela veut dire qu’on a fait du bon travail ». « On ne l’a pas fêté. Il faut garder la tête sur les épaules, dans la vie en général. C’est l’éducation que j’ai reçue », ajoutait-il.
« Le succès est arrivé vite, c’est vrai. C’est dû, je pense, à beaucoup de travail. Je passe quasiment ma vie en studio« , confiait-il.
Werenoi s’exposait avec une expression neutre et des lunettes de soleil. L’expression de ses émotions était réservée au public de ses concerts.
Repose en paix, Werenoi.
« Le silence des vrais fait plus de bruit que le vacarme des faux. »

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