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Mali : vers la dissolution des partis et un long mandat pour Goïta

Mali : La dissolution des partis politiques, un miroir tendu à une classe politique défaillante

À Bamako, ce 30 avril, le Centre international de conférences (CICB) a vibré au rythme d’une concertation nationale des forces vives, un rendez-vous décisif pour redessiner l’avenir politique du Mali. Dans un pays en quête de renouveau après des années de crises, les recommandations issues de cette rencontre, notamment la dissolution des partis politiques et l’extension du mandat du général Assimi Goïta à cinq ans, ont retenti comme un coup de tonnerre. Loin d’être un caprice autoritaire, ce verdict reflète le vide laissé par une classe politique qui, au lieu de saisir l’opportunité d’un débat constructif, a choisi l’esquive, abandonnant ainsi le terrain à d’autres forces. Dans un Mali à la croisée des chemins, cette concertation révèle autant les espoirs d’une refondation que les défaillances d’une élite déconnectée.

L’occasion manquée des partis politiques : le boycott qui a scellé leur destin

En effet, ce verdict sanctionne une occasion manquée pour les partis politiques. Lancée le 28 avril 2025, la concertation nationale visait à réviser la Charte des partis politiques, un texte censé encadrer la vie démocratique dans un pays marqué par des coups d’État successifs en 2020 et 2021. Ce processus, amorcé dès les concertations locales des 16 et 17 avril, offrait aux partis une tribune en or pour renouer avec les Maliens. Les autorités de transition, dirigées par le colonel Goïta, avaient appelé à une mobilisation inclusive, des villages aux grandes villes, pour forger une charte répondant aux réalités du pays. Mais, comme l’a déploré un participant, les partis, au lieu de « prendre part aux décisions », ont préféré « subir celles des autres ».

Au lieu de sillonner les campagnes, de parler en bambara, en peul ou en songhaï et d’expliquer leur vision aux populations, la plupart des formations politiques ont opté pour le boycott ou des conciliabules élitistes à Bamako. Une centaine de partis, dans une rare prise de position publique, ont dénoncé une possible dissolution, craignant un scénario à la nigérienne ou burkinabè, où les partis ont été marginalisés. Pourtant, cette posture défensive, souvent relayée par des conférences de presse loin du peuple, a renforcé l’image d’une classe politique déphasée, incapable de répondre aux attentes d’un Mali en quête de souveraineté et de stabilité.

Un vide historique : les racines profondes de la crise de légitimité des partis maliens

C’est pourquoi les recommandations de la concertation, incluant la dissolution des partis, ne sont pas tombées du ciel. Elles traduisent un désaveu profond, ancré dans l’histoire récente du Mali, qui a créé un vide politique. Depuis le coup d’État de 2020, qui a renversé le président Ibrahim Boubacar Keïta, les partis politiques peinent à incarner une alternative crédible. Leur incapacité à s’unir face aux crises sécuritaires, économiques et sociales, conjuguée à leur absence lors des dialogues nationaux, a creusé un fossé avec les citoyens.

Le dialogue inter-malien pour la paix et la réconciliation, tenu du 13 avril au 10 mai 2024, avait déjà proposé d’étendre la transition de trois à cinq ans et de permettre à Goïta de se présenter à la présidentielle, signe d’une volonté de consolidation du pouvoir militaire. Cette concertation, boycottée par de nombreux partis, a révélé leur faiblesse stratégique.

Dissolution : le projet « Mali Kura » prend forme sur le terrain laissé libre

Face à ce vide, le gouvernement de transition , sous la houlette de Goïta, capitalise pour asseoir son autorité. Depuis 2021, elle a multiplié les gestes symboliques, comme l’adhésion à l’Alliance des États du Sahel (AES) avec le Burkina Faso et le Niger, ou le renforcement des partenariats avec la Russie et la Chine, perçus comme des gages d’indépendance face à l’Occident. À Bamako, la concertation nationale a été saluée par certains comme une étape vers le « Mali Kura » (nouveau Mali), un projet de refondation prôné par le gouvernement de transition. Les participants, issus de divers horizons, ont appelé à une charte épurée, débarrassée des partis jugés « opportunistes » et éloignés des aspirations populaires.

Mali à la croisée des chemins : quel pluralisme politique pour l’avenir ?

En conséquence, la concertation nationale de ce jour marque un tournant. En proposant la dissolution des partis, elle pose la question de la place du pluralisme dans le Mali de demain. Les partis, en boycottant le processus, ont laissé le champ libre à une redéfinition des règles par d’autres acteurs, souvent plus proches des autorités. Pourtant, l’histoire du Mali, riche de figures comme Modibo Keïta, enseigne que la légitimité ne se décrète pas : elle se gagne au contact du peuple.

À Bamako, où les mosquées côtoient les marchés vibrants, le débat continue. Les Maliens, las des promesses non tenues, aspirent à une gouvernance ancrée dans leurs réalités. La dissolution des partis, si elle se concrétise, pourrait ouvrir la voie à un renouveau politique, mais au prix d’un pluralisme fragilisé. Dans ce Mali charnière, une certitude demeure : ceux qui fuient le débat laissent à d’autres le soin d’écrire l’avenir.


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