Le décès d’un président d’institution constitue toujours un moment délicat pour une démocratie. Lorsqu’il s’agit du président du Conseil constitutionnel, gardien de la régularité des élections et garant de la conformité des lois à la Constitution, la question de la succession devient encore plus cruciale. Que prévoit le droit sénégalais dans ce cas précis ? Peut-on craindre une vacance préjudiciable au bon fonctionnement des institutions ?
Pour Abdoul Aziz Kébé, constitutionnaliste et enseignant à l’Université Cheikh Anta Diop (UCAD), la réponse est claire. Il rappelle que la Constitution, ainsi que la loi organique n° 2016-23 du 14 juillet 2016 relative au Conseil constitutionnel, prévoient une organisation interne permettant d’assurer la continuité du fonctionnement de l’institution, même en cas de disparition soudaine de son président. « En cas de décès, de démission ou d’empêchement définitif du président, c’est le doyen d’âge parmi les membres du Conseil constitutionnel qui assure automatiquement l’intérim », explique le professeur Kébé.
Ce remplacement provisoire permet au Conseil de continuer à siéger, à rendre des décisions et à assumer ses fonctions, dans l’attente d’une nouvelle nomination. Le président du Conseil constitutionnel étant nommé par le Président de la République, la désignation d’un successeur relève donc de la prérogative présidentielle, à exercer dans des délais raisonnables, afin d’éviter un intérim trop long. Pourquoi le doyen d’âge ? « C’est un principe de sagesse et d’expérience. Le doyen est censé avoir le recul et la maturité nécessaires pour éviter tout dérapage ou toute instrumentalisation de l’institution », ajoute Abdoul Aziz Kébé.
Le Conseil constitutionnel du Sénégal est composé de sept membres, dont le président. Ses décisions sont prises de manière collégiale, et sa légitimité repose autant sur la solidité de son cadre juridique que sur la crédibilité de ses membres. En cas de décès du président, l’institution reste donc pleinement fonctionnelle, même si, symboliquement, la perte est toujours lourde. En période électorale ou à l’approche de décisions majeures, cette continuité devient d’autant plus importante. Le Conseil constitutionnel a notamment la charge de proclamer les résultats des élections présidentielles, de se prononcer sur la recevabilité des candidatures et de juger de la régularité du scrutin. Le décès de son président ne doit en aucun cas entraîner un blocage ou une crise. C’est pourquoi le législateur a prévu cette relève temporaire en interne.
Pour conclure, le système sénégalais repose sur des garde-fous bien définis. En cas de vacance à la tête du Conseil constitutionnel, la transition s’organise sans rupture, dans l’esprit républicain. Le doyen d’âge prend le relais, et le Président de la République désigne, en temps utile, une nouvelle figure pour incarner cette haute juridiction.
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